Hotel Radio : Le fleuron de l'Art Déco
Situé dans un quartier calme sur les hauteurs de Chamalières, cet établissement de 1929 érigé par Monsieur D' Argent, faisant partie des plus belles tables d' Auvergne est aussi l'un des fleurons de l'architecture des années 30.
A cette époque, les créateurs s'imprégnaient des objets de la vie courante pour les intégrer, les symboliser dans l'architecture.. L'architecte Marcel Jarrier, alors âgé de 28 ans , travaille avec son père Louis sur ce projet, fortement imprégné par l'exposition universelle de 1925. Celle-ci couronnait ce que l'on désignera quelques années plus tard par « l' Art déco » :L'Hôtel Radio reste unique par son architecture, sobre, massive, aux lignes épurées, aux angles vifs ou arrondis, jouant sur la polychromie des matériaux dont la brique perchée sur sa hauteur contraste avec le crépis blanc. Les ornements sobres et discrets de mosaïques des deux petits piliers du balcon renvoient les reflets du soleil vers un paysage époustouflant. C'est dans cet établissement qu'a grandi Caroline Mioche, journaliste de formation, qui l' embellit jour après jour avec passion. Son grand-père en était tombé sous le charme en 1954. L'année suivante, il en était l'heureux propriétaire. Mais il n'y a aucune archive de cet Hôtel Restaurant. Caroline Mioche, tout comme son grand-père puis son père en 1978, entretient désormais ce joyau avec passion, dans les règles de l'art, avec le souci permanent de faire rayonner le bâti. La hauteur des plafonds, impressionnante dans l'entrée, les mosaïques au sol, sont réchauffées par des éclairages indirects et chaleureux, des ferronneries « chocolat » et des vitres polies au dessins arrondis et anguleux, respectant à la perfection ce style Art Déco.
Ce bâtiment, à la demande de Monsieur d' Argent, construit sur le roc, a rassemblé en 1929 autour de Louis et Marcel Jarrier, architectes, deux très grands talents : Isidore Odorico et Raymond Subes, tous deux ayant une renommée internationale,, mosaïste pour l'un, ferronnier d'art pour le second. Tous deux représentaient l'élite artistique des années 30.
La famille Odorico est implantée à Rennes. Le père d' Isidore détient l'une des plus grandes entreprises de mosaïques de la région et une centaine d'employés, tous italiens d'origine. Isidore, poursuit les traces de son père avec un atout non négligeable : C'est un artisan, un artisan artiste, diplômé de l' École des beaux arts et si l'art déco tend à décliner après 1925, l'entreprise Odorico est quon apogée.
Car l'artisan artiste, apporte avec ses connaissances et son savoir-faire une dimension particulière. Isidore Odorico vivait pour la mosaïque, la fête et le football. « Sa femme ne pouvait rien prévoir » comme l'avoue sa petit-fille Stéphane Odorico. Il disait qu'il rentrait dîner et ne rentrait pas, ou disait de ne pas l'attendre et ils arrivaient à 10. Mon grand-père avait une vie tumultueuse. Il vivait pour son entreprise. C'était un homme très exubérant. Il était très exigeant pour lui mais aussi pour les autres ».
La famille Odorico possédait un savoir- faire unique et venait souvent se fournir en Auvergne pour la matière première, d'autant plus que le thermalisme utilisait fortement la mosaïque pour ses bâtiments dont Louis Jarrier a largement participé à leur construction. Les mosaïstes de l'époque, découvrant qu'il était possible de préparer les motifs sur des plaques de papier et de les coller ensuite par inversion pouvaient ainsi travailler chez eux et être beaucoup plus à l'aise. C'est ainsi que la maison Odorico, appartenant aujourd'hui à un particulier, est couverte de multiples mosaïques posées à même le sol.
Raymond Subes est l'un des ferronniers d’art français les plus célèbres de la période Art déco à qui l'on doit notamment les rampes d'escalier et les balustrades du paquebot Île de France en 1926 , puis des paquebots Le Lafayette en 1930 , l' Atlantique en 1931 et le Normandie en 1935 Il collabore également avec les plus grands décorateurs de l'époque.
L' Hotel Radio figure parmi les plus beaux hôtels Art déco de France et Caroline Mioche l'entretient avec la passion de ses aînés, la fougue de sa jeunesse et un sourire discret, emprunt de l'âme de ceux qui lui sont si chers.